Monsieur Joseph Zenny,
Vous avez fait une publication sur twitter en septembre 2017, je ne sais si c'était une blague, dont la teneur porte à croire que ce sont les «malere» qui ne cessent de «grennen» des «ti vòlè» qui sont les principaux responsables de la misère de ce pays dont 5% de gens possèdent presque toutes les richesses.
«Matirite, se lè ou konnen ou se malere ou pa ka fè 5 pitit, ou pral lage 5 ti vòlè nan lari a apre pou w pale peyi a mal #MatiriteSeTepeKòkOu» telle a été votre publication sur twitter. Quelle mauvaise blague, hein ! Blague, si c'en était une.
Monsieur Zenny, vous ne me connaissez pas, Joubert Joseph, ce nom ne doit rien vous dire. Mais, compte tenu de mon admiration pour vous, je trouve qu'il est nécessaire voire obligatoire de vous écrire. Je ne vais pas vous parler de certaines de vos chansons qui ont bercé mon enfance, non loin de-là. Je pense qu'il est nécessaire de parler d'autres choses. Laissez-moi vous dire que mon père et ma mère, «malere» de leur état, se sont permis d'avoir 5 enfants pourtant, ces derniers ne sont pas des «ti vòlè» comme, «petit riche» de votre état, vous le prétendez. Deux d'entre eux ont déjà bouclé leurs études universitaires et les trois autres sont étudiants dont moi. Je ne vois pas vraiment comment qualifier les conneries d'un artiste de votre calibre dont certains «malere» chantent les chansons et vont même à ses bals. Il faut vous dire qu'on ne se lève pas un matin en pensant pouvoir identifier les problèmes empêchant le développement d'un pays comme vous le faites. C'est plus complexe que vous ne l'imaginez. Ces «malere» que vous culpabilisez sont plutôt des victimes du statut-quo. Monsieur Zenny, si votre cerveau n'est pas habitué à ce genre d'exercice cela doit vous paraître difficile voire impossible à moins que vous fassiez une gymnastique intellectuelle mais il faudrait quand même avoir un minimum de culture. Pour une fois vous avez raté une occasion de vous taire.
Ces «malere» qu'on paie 350 gourdes comme salaire journalier, dans des mauvaises conditions de travail, ne sont pas responsables de la misère du pays. Ils acceptent de faire des travaux humiliants afin de garantir une bonne éducation à leurs enfants que vous traitez de «ti vòlè». Non, ils n'ont causé aucun tort au pays. Ce ne sont pas eux qui ont dilapidé près de 3.4 milliards de dollars américains des fonds PetroCaribe. Ces «malere» ont des enfants professeurs, écrivains, sociologues, journalistes, médecins, avocats, ingénieurs… qui ont construit leur vie dans la dignité. Apparemment, vous êtes sensible pour l'image du pays, c'est bien. Vous avez peur qu'on en dise du mal, c'est encore bien. Mais cela ne vous donne aucune légitimité pour cracher sur les couches sociales les plus défavorisées qui représentent plus de la moitié de la population haïtienne.
Monsieur Zenny, avec tout le respect que je vous dois, permettez-moi de vous dire qu'il y a urgence de combler votre grave déficit de cognition. Sinon vous causerez de grands torts à bon nombre de jeunes vous prenant comme modèle. Et en plus, il n'y a aucune fierté d'exposer son ignorance en public. Vous vous tromperez gravement si vous prenez mes mots comme des injures ou des insultes, seul un fan vous adorant réellement peut oser vous parler avec une telle franchise. C'est un sentiment d'amour et d'indignation qui me pousse à vous écrire ainsi. Recevez, monsieur, l'expression de mes salutations les plus sincères.
Joubert Joseph
Delmas, 4 janvier 2018
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